Yannick Manche, chargé de mission eau et milieux aquatiques au Parc, fait un point sur la situation des cours d'eaux, le déficit des précipitations des derniers mois et les perspectives pour cet été. L'occasion de revenir également sur l'importance de préserver les zones humides..
Actuellement, quelle est la situation des cours d'eau sur le territoire du Parc ?
Même si les niveaux des cours d’eaux ont remonté juste après les petits épisodes pluvieux ou neigeux survenus au début de l’année, l'état global est très préoccupant. Nous sommes actuellement à des niveaux correspondants normalement à un début d'été. Nous pouvons parler de sécheresse hivernale, qui en soit n'est pas une situation exceptionnelle (avec les précipitations neigeuses et le gel, les sécheresses hivernales sont normales). Ce qui est préoccupant pour la suite est le déficit de précipitations depuis de nombreux mois.
Par exemple, sur le mont Aigoual, l’année dernière il est tombé 1217 mm d’eau, ce qui représente 62 % de la pluviométrie normale. 2022 a ainsi été la 4ème année consécutive déficitaire. La recharge, qui correspond à la période allant de septembre 2022 à mars 2023 a été de 595 mm soit moins de la moitié de la normale. Ce sont des niveaux de pluviométrie que l’on retrouve habituellement sur la plaine du Gard.
Ces déficits s'observent sur l’ensemble du territoire et la majorité des cours d’eau sont impactés de la même façon comme Le Tarn, La Dourbie…
Peut-on déjà s’attendre à une nouvelle sécheresse estivale ?
C'est très difficile de le prévoir à ce jour, cela dépendra de la météo des prochaines semaines mais il est certain qu’il faut impérativement que les précipitations soient importantes et surtout régulières. Les pluies récentes sont presque anecdotiques et trop espacées. S’il ne pleut pas abondamment prochainement, la situation risque d'être très compliquée cet été au vu de l'état actuel des réserves.
Les recharges se font d'octobre à fin mars. Ensuite, la végétation, le vent et le soleil augmentent l'évapotranspiration et l'humidité repart dans l'atmosphère au lieu de s'infiltrer.
Comment agir dès aujourd'hui ?
Les services de l’État du national au local sont bien évidemment mobilisés pour appréhender au mieux la situation.
Au niveau du Parc national, nous suivons les niveaux des cours d'eau et sensibilisons à l'impact potentiel de cette situation sur la biodiversité, le tourisme et les pratiques agricoles.
Ensuite, chacun peut agir à son niveau pour préserver cette ressource qui devient de plus en plus précieuse. Il faut dès aujourd'hui adopter des pratiques qui sont habituellement recommandées en été en limitant autant que possible l'usage de l'eau dans son quotidien : pour les tâches ménagères, l’arrosage des jardins, le lavage de voitures, le remplissage des piscines...
Dans ce contexte la préservation des zones humides est majeure ?
En effet, la situation actuelle est une occasion de plus pour sensibiliser à la protection des zones humides.
L’établissement public organise actuellement un suivi sur les relations entre les zones humides et les cours d’eau. Sur le territoire du Parc national on recense plus de 2 000 zones humides. Elles ont des propriétés très utiles en matière de réduction des sécheresses et des canicules : la zone humide absorbe l’eau dont une partie va s’infiltrer et alimenter les nappes phréatiques. Durant l’été, cette eau contribue à maintenir les débits des cours d’eau et permet le bon fonctionnement des écosystèmes et donc des activités humaines. Il est crucial de les protéger, par exemple lors des écobuages et en évitant les travaux susceptibles de les altérer...