Une nouvelle station d'Azuré de la Croisette a été repérée sur le Causse de Blandas. Une belle découverte qui confirme une fois de plus l'intérêt des Atlas de la Biodiversité Communale !
Retour sur cet évènement avec Cyril Rombaut, garde moniteur sur le Massif de l'Aigoual.
C’est en juin 2019 au hasard d’une surveillance d'un couple de circaète que je suis tombé pour la première fois sur ce grand azuré rare et discret. Élégante, au vol souple, une femelle d’Azuré de la Croisette (Maculinea alcon rebeli ) arpentait les rebords du Causse de Campestre pour trouver la plante hôte où elle pondrait ses œufs.
Un an plus tard, des recherches sérieuses furent entreprises. Après une investigation minutieuse, quelques Gentianes croisettes avec des pontes furent trouvées ! Ces belles plantes servent de garde-manger aux futures chenilles de ce papillon.
Connue des naturalistes insectopathes de la région, cette station est située hors du périmètre du Parc national des Cévennes et ne peut, par conséquent, être intégrée aux bases de données du territoire.
L'objectif était alors de trouver d’autres stations de Gentiane croisette sur les marges sud du Parc dans des habitats favorables à ce papillon exigeant. Nous aurions certainement des chances d'y observer également l'Azuré de la croisette.
Un des aspects fascinants de l'Azuré de la Croisette est son exigence. Car non content de se nourrir d'une seule et unique espèce de gentiane (rare de surcroît), ce papillon a également besoin de l’assistance d’une fourmi du genre Myrmica pour que sa chenille arrive à maturité !
En effet, tel le coucou dans le nid d’un passereau, la chenille de l'Azuré de la croisette se fait nourrir à l’œil pendant tout l’hiver. Une partie des individus resteront même deux ans dans la fourmilière avant de se nymphoser (passage de l’état de chenille à celui de papillon).
Comble du parasitisme, elle pousse même le sans gène jusqu’à se nourrir de quelques larves de fourmis pour provoquer la panique de ses hôtes qui continuent à l'alimenter pour éviter l’hécatombe !
Voici une vidéo qui illustre un phénomène similaire avec un autre papillon, l'Azuré du Serpolet :
L’inconvénient de cette ultra spécialisation est qu’elle implique de petites populations très localisées, ainsi qu’une grande fragilité de l’espèce face aux modifications de son milieu. C’est de ce fait une espèce rare et protégée sur le plan national et nous avons donc à l’échelle du Parc National des Cévennes une forte responsabilité pour la conservation de cet insecte et de son habitat.
Si l’espèce est bien présente sur le Causse Méjean elle est nettement plus rare et localisée au sud du Parc. C'était donc un véritable défi de l'y trouver qui explique la surprise et l'émotion ressentie le 12 juin dernier...
En effet, nous étions alors en prospection sur des pelouses du nord du Causse de Blandas dans le cadre de l’Atlas de la Biodiversité Communale sur les communes d’Alzon et d’Arrigas.
L'Azuré de la Croisette faisait partie de nos "objectifs" du jour car nous avions repéré à cet endroit quelques gentianes croisette lors de précédentes missions et nous savions que la zone était un habitat favorable.
Ce jour là nous sommes d'abord tombés sur des imagos (papillons adultes) mâles à la recherche de femelles. Un excellent signe qui nous a poussé à intensifier nos recherches avant de trouver le Graal : des pontes sur des gentianes en boutons ! Nous venions donc de découvrir une nouvelle station d'Azuré de la coisette !
Je m'empressais de prendre en photo la ponte (ci-dessous) et de la signaler sur notre base de donnée.
Il convient désormais de suivre cette petite population pour connaître son importance, son évolution et comprendre par exemple si les pratiques pastorales sur ces pelouses sont favorables à son maintien…
Affaire à suivre !
Cyril Rombaut, garde moniteur sur le Massif de l'Aigoual
Pour aller plus loin:
